Retable de Saint-Etienne

L’œuvre se compose de quatre registres délimités par de faux éléments d’architecture rappelant les piliers semi engagés des églises.
Le mot retable vient de l’espagnol retablo qui signifie planche, il désigne la partie postérieure et décorée d’un autel, qui surmonte verticalement la table. Le retable avait une importance colossale puisque la majorité des fidèles étaient illettrés. Ainsi, il servait de support à la liturgie et permettait d’enseigner des épisodes de la Bible, de la vie du Christ, ou d’autres Saints.
Le retable de Villerouge-Termenès date de 1557 et sa structure est en noyer. Il est consacré à la vie et au martyr de Saint-Etienne qui passe pour être le tout premier martyr chrétien après le Christ. Son corps a été découvert en 415 à Caphargama par le prêtre Lucien et transféré à Jérusalem dans l’église bâtie en son honneur par l’impératrice Eudocie, épouse de Théodose. Puis on le transféra de nouveau à Constantinople avant d’être ramené à Rome dans l’église St-Laurent-Hors-Les-Murs. Au total ce sont huit Papes qui prendront le nom d’Etienne, le dernier en 1057. Etienne est le saint patron des fondeurs (nombre d’exploitations minières sont présentes à Villerouge-Termenès, ce qui explique peut être le choix de ce saint sur la commune) et il est fêté le 26 décembre.

Le premier registre présente quatre des prophètes de l’Ancien Testament : Edras, Néhémie, David et Elie.
EDRAS :
Il était le descendant d’Aaron (frère aîné de Moïse et premier grand prêtre d’Israël), c’était un scribe émérite qui reçut un document officiel d’Artaxerxés (roi perse achéménide) pour organiser la communauté hébraïque. Il fut Grand Prêtre de Jérusalem et le premier codificateur du judaïsme.
NÉHÉMIE :
Il avait été déporté à Babylone par les perses vers 540 av. J.C. Ce fut sous Artaxerxés que Néhémie rentra à Jérusalem. Il mit en route la reconstruction de la ville et du mur d’enceinte, et réorganisera le peuplement de la Palestine Antique.
DAVID :
Roi de Juda vers 1010 av.J.C. Vainqueur de Philistins, il fonda sa capitale à Jérusalem. Il fut le père du roi Salomon.
ÉLIE :
Il fut un grand prophète sous le règne d’Achab, roi d’Israël. A cette époque, Israël était la partie nord de l’ancien royaume hébreu. Sa capitale était Samarie. Sa population était considérée comme impie par les habitants de l’autre partie sud, le royaume de Juda avec Jérusalem comme capitale. Le prophète Élie rappela les gens d’Israël à l’obéissance à Yahvé. Il mourut selon la légende « enlevé sur un grand char en feu ».

La première peinture nous présente le saint se faisant ordonner Diacre par les Apôtres. Saint-Etienne au milieu à genoux est vêtu de la dalmatique traditionnelle et est représenté sous l’apparence d’un jeune homme imberbe. Auprès de lui se tient à sa droite Saint-Thomas et à sa gauche Saint-Pierre, caractérisé dans l’iconographie sous l’apparence d’un vieil homme dégarni à la barbe blanche bien fournie. Saint Etienne fut l’un des sept sages que les apôtres choisirent afin de les aider durant leur mission éducative (Etienne, Philippe, Prochore, Nicanor, Timon, Parménas et Nicolas).
Sur la deuxième peinture, le saint est en train de prêcher sur sa chaire pour ses fidèles agenouillés. Au premier plan, on peut voir un infirme priant, c’est l’évocation des miracles du saint. Au second plan, on peut voir le Grand Sanhédrin de Jérusalem écouter le prêche de Saint-Etienne. Le Grand Sanhédrin était le conseil de la noblesse sacerdotale juive, c’était le tribunal civil et religieux de la Palestine Antique.
La troisième et quatre peinture nous montre le saint discutant avec les membres de ce conseil. Ces derniers, furieux de ne pouvoir répondre à ses arguments, l’accusèrent faussement de blasphémer et de comploter contre les autorités. Etienne s’avança sans crainte devant ses juges et leur tint un discours enflammé, leur rappelant que Dieu n’avait cessé de montrer sa patience à son peuple, accordant son alliance aux Patriarches et promettant de les délivrer de l’idolâtrie, mais que lorsque le Christ arriva sur terre, les juifs montrèrent le même cœur dur et la même résistance. « tels furent vos pères, tels vous êtes » (acte 7 :51-52).
La grâce de Dieu, remplissait le cœur de Saint Etienne et le rendait « semblable au ciel », irradiant son visage d’une lumière divine, comme le seigneur le jour de sa transfiguration ( cf. Matthieu 17 :6 ) c’est en rayonnant tel un ange de Dieu qu’il clama «je vois les cieux ouverts et le fils de l’homme debout à la droite de Dieu » (actes 7 :56).
Incapables de supporter cette révélation de l’exaltation de Jésus Christ, les représentants du grand Sanhédrin se bouchèrent les oreilles et se ruant sur Etienne, ils le menèrent hors des murs de la ville.

Sur le troisième registre, Etienne est donc conduit hors des murs de Jérusalem à l’aide des gardes romains, facilement identifiables par leurs vêtements, derrière eux ce tient Gamaliel (reconnaissable à son turban et sa barbe fournie).
Sur la sixième peinture, ces derniers le lapident sous le regard attristé du Christ. Tandis qu’on le mettait à mort, Etienne, calme et radieux, exultait de joie de pouvoir ainsi suivre la même voie que le Christ. Dans son dernier souffle, par amour pour ses ennemis, il déclara « Seigneur ne leur impute pas ce péché ! » ( acte 7 :60 ; cf. Luc 23 :34 ).
La peinture nous présente le corps de Saint Etienne dans un sarcophage. Il est bénit par l’évêque de Jérusalem Jean et pleuré par ses fidèles. L’évêque est parfaitement identifiable par la crosse qu’il tient dans sa main gauche ainsi que par la mitre qu’il porte sur la tête. Derrière lui, à la hauteur de la tête du saint se tient un homme barbu, Gamaliel. Ce dernier aurait été chargé d’inhumer le corps du saint dans le lieu où par la suite il reposera avec son fils Abibas et son neveu Nicodème.
Selon la légende, Gamaliel serait réapparu 400 ans plus tard à un prêtre du nom de Lucien pour lui révéler l’endroit de la sépulture. C’est ce qui est figuré sur les deux scènes du huitième tableau. L’arrière plan, nous montre le songe du prêtre endormit visité par Gamaliel.
Au premier plan Gamaliel explique au prêtre comment faire pour identifier le corps du saint homme. La martyrologie veut qu’il y est quatre sarcophage (Etienne, Gamaliel, Abibas et Nicodème). Sur chacun des sarcophages, nous dit la légende, il y avait des vases, trois étaient d’or et un d’argent. Deux des vases en or contenaient des pétales de roses blanches et étaient les sépultures de Gamaliel et de Nicodème et celui d’Abibas était en argent avec du safran à l’intérieur. Seul, le vase d’or contenant les pétales de roses rouges était celui de Saint-Etienne.
Cependant sur la peinture nous pouvons constater qu’il n’y a que trois sarcophages mais en revanche il y a bien quatre vases. Il est peu probable que l’artiste se soit trompé, car à cette époque la vie des saints et la bible étaient connus de tous et en particulier des artistes qui les illustraient. Le peintre a donc fait volontairement abstraction du sarcophage de Gamaliel car ce dernier est représenté charnellement à coté du prêtre.

le prédelle

Tout en bas sur la prédelle (nom donné à la partie horizontale à la base du retable) le dernier registre est consacré à quatre femmes tenant des objets de la passion du Christ.
A droite de l’autel, la troisième femme tient dans sa main la lance du légionnaire romain qui blessa le Christ sur son flan (l’un des stigmates).
Et enfin, la dernière femme porte la couronne d’épines que Ponce Pilate fit mettre sur la tête du Christ en même temps que l’inscription INRI ( Jésus de Nazareth roi des juifs).

Pour conclure, il semblerait que le retable ne soit pas dans sa configuration initiale. Il aurait été peint par un artiste espagnol et monté dans une église de Navarre. On ne sait pas la date d’acquisition du retable par l’archevêché.
De plus, il est possible qu’il manque des panneaux de bois peints ; les spécialistes chargés de sa restauration ont émis cette hypothèse en analysant la construction et l’agencement de la structure du retable. En effet, il y aurait en haut à gauche, à coté des prophètes, des rainures laissant penser qu’il devait y avoir d’autres peintures. La prédelle serait quant à elle un réemploi d’un autre retable plus moderne que le premier.